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À Nashville, les traces durables d’une tuerie de masse

Un massacre survenu dans une école primaire, il y a un an, continue d'affecter de nombreux citoyens dans la capitale du Tennessee.

Des enfants marchent main dans la main, près de deux autobus jaunes.

La tuerie à l'école primaire Covenant, en mars dernier, a marqué de nombreux résidents de Nashville. Sur la photo, des enfants en train d'évacuer l'école.

Photo : Associated Press / Jonathan Mattise

Il y a eu plus de 80 fusillades dans des écoles aux États-Unis en 2023, selon un décompte effectué par CNN. Ces tragédies peuvent laisser des traces durables au sein des communautés touchées, tant sur le plan psychologique que sur celui des revendications politiques. C’est le cas à Nashville, où une tuerie a fait six morts dans une école primaire, il y a un an.

C’était le 27 mars 2023, peu après 10 h. Ce matin-là, le chirurgien pédiatrique Joseph Fusco amorçait son quart de travail à l’hôpital pour enfants Monroe Carell Junior, en plein cœur de la capitale du Tennessee. C’était a priori une journée comme les autres.

Tout a changé quand nous avons reçu la fiche d'une première victime par balle, puis deux fiches de plus. Nous avons tous couru à la salle d'urgence, se remémore-t-il sur son lieu de travail, où nous le rencontrons.

Un homme sourit à la caméra.

Le Dr Joseph Fusco est l'un de ceux qui ont pris les victimes en charge après la tuerie à l'école primaire Covenant, en mars dernier.

Photo : Radio-Canada / Violette Cantin

La personne responsable du massacre à l'école primaire Covenant a tué trois enfants de neuf ans et trois employés en quelques minutes, à l’aide d’un fusil de type AR-15. Les policiers l’ont rapidement abattue et les jeunes victimes ont été envoyées à l’hôpital. Le Dr Fusco est l’un de ceux qui les ont prises en charge, mais il n’y avait déjà plus rien à faire.

Ce sentiment de désespoir, il m'a habité cette journée-là. Et il est resté avec moi depuis, poursuit le chirurgien. Il évoque avec une émotion contenue, mais visible, les dommages épouvantables et dévastateurs faits à leurs corps innocents.

Un an plus tard, Joseph Fusco est toujours profondément habité par ce qu’il a vu cette journée-là. Il y a des nuits où je me réveille et où je vois les visages de ces enfants.

Il sait qu'il n'est pas le seul. Cet événement a profondément affecté et changé ma vie. Je ne peux même pas imaginer à quel point il a changé celle des familles des victimes et de notre communauté.

Des jeunes descendent dans la rue

La pédiatre Kelsey Gastineau se souvient elle aussi parfaitement de cette journée horrible, l’une des plus difficiles de [sa] carrière.

Elle ne faisait pas partie de ceux qui ont pris les victimes en charge cette journée-là. Mais des patients blessés par armes à feu, elle en a soigné très souvent. Trop souvent.

Ce qui rend les blessures par armes à feu différentes, c'est qu'elles sont entièrement évitables, croit la pédiatre. Au sein de la communauté médicale du Tennessee, elle est l'une des voix qui demandent au gouvernement de prendre des mesures pour lutter contre la violence par armes à feu.

Après la tragédie de l'école Covenant, elle a senti les importantes conséquences psychologiques sur sa communauté. Mais elle a aussi senti un changement politique.

Une femme sourit à la caméra.

La violence par armes à feu au Tennessee inquiète énormément la Dre Kelsey Gastineau.

Photo : Radio-Canada / Violette Cantin

Dans les derniers mois, ce qui m'a apporté le plus d'espoir, c'est de voir les jeunes de ma communauté utiliser leur voix, déclare-t-elle.

En effet, exactement une semaine après la tuerie, des milliers d'étudiants ont quitté leur salle de classe en plein jour pour marcher jusqu'au Capitole de l'État et demander au gouvernement d'agir pour lutter contre la violence par armes à feu.

J'ai vécu ici presque toute ma vie et je n'ai jamais rien vu de tel, raconte Brynn Jones, étudiante de 22 ans à l’Université Vanderbilt de Nashville. La jeune femme a coorganisé la mobilisation et s'implique au sein de l'organisme March for Our Lives, qui milite contre la violence par armes à feu.

La communauté ne peut pas passer à autre chose puisque les législateurs n’ont rien fait après la tuerie.

Une citation de Brynn Jones, étudiante à l'Université Vanderbilt

Le Congrès du Tennessee est dominé par une supermajorité républicaine, celle-là même qui, il y a deux ans, a éliminé l’obligation de détenir un permis pour posséder une arme à feu. Dans l'État, n’importe quel citoyen de plus de 21 ans peut dorénavant porter une arme à découvert.

Dans un effort pour répondre aux revendications qui ont découlé de la tuerie, le gouverneur républicain, Bill Lee, a convoqué une session législative spéciale au mois d’août.

Plusieurs mesures y ont été étudiées, dont la possibilité de permettre à certains enseignants de porter une arme à l'école. L'idée a été décriée par plusieurs militants en faveur d'un contrôle plus strict des armes à feu. Au terme de la séance, aucune nouvelle politique n’a finalement été adoptée.

Ce dénouement a indigné Brynn Jones. La tuerie à l’école primaire Covenant n’est pas la dernière que nous aurons au Tennessee. Il n’est pas question de savoir si une autre tuerie aura lieu, mais de savoir quand elle aura lieu.

Violette Cantin est lauréate de la bourse Expérimenter le journalisme à l'étranger de la Fondation de l'UQAM.

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