À Kansas City, le soccer féminin avance à fond de train
Patrick Mahomes et sa femme Brittany ont doté le Current de Kansas City, en NWSL, du premier stade construit spécifiquement pour une équipe professionnelle féminine.
Photo : Twitter
Le soccer est populaire partout dans le monde, mais c’est vers Kansas City que les yeux des amateurs sont rivés.
Dans une semaine, le sport féminin entamera une nouvelle étape de sa montée en popularité lorsque le Current de la NWSL jouera dans son nouveau stade, le premier construit spécifiquement pour une équipe professionnelle féminine.
Financé à 95 % par des fonds privés, et bâti au coût de 120 millions de dollars en plein centre-ville, le Stade CPKC fait la manchette en vue de son ouverture le 16 mars. Situé aux abords de la rivière Missouri, l'amphithéâtre de 11 000 places à de quoi charmer, et non seulement pour la vue.
Une maquette du Stade CPKC, dont la construction a commencé à l'automne 2022.
Photo : Current de Kansas City
Le match entre les Thorns de Portland, de la Canadienne Jessie Fleming, et le Current, mené par la vedette brésilienne Debinha, étrennera l'amphithéâtre. Il sera diffusé aux États-Unis sur le réseau ABC à l’échelle nationale.
À la signature de son contrat, l’année dernière, la joueuse sud-américaine avait mentionné que tout ça l'avait poussée à s’engager à Kansas City. Je suis vraiment heureuse non seulement pour l'équipe, mais aussi pour le soccer féminin
, avait-elle dit.
Qu’on joue pour Kansas City ou pour d’autres clubs dans la NWSL, le projet est emballant.
Je suis vraiment enthousiaste, a reconnu la gardienne québécoise Lysianne Proulx, du Bay FC, à Radio-Canada Sports. J’ai hâte d’aller jouer là-bas. Je crois que ça établit un nouveau standard pour tous les clubs, et pas seulement aux États-Unis, mais partout dans le monde.
La Brésilienne Debinha est la joueuse étoile du Current de Kansas City.
Photo : usa today sports via reuters con / Jay Biggerstaff
Sa coéquipière de la formation canadienne Bianca St-Georges, qui est passée de Chicago à la Caroline du Nord cet hiver, juge que les infrastructures de Kansas City sont inspirantes pour tous les autres clubs
.
Ça va inciter les clubs à placer la barre plus haut pour offrir aux athlètes ce qu’elles méritent. Ça montre que le sport prend de l’ampleur. Il n’y a que du positif à pouvoir profiter de ses propres installations. Ça élève le standard et ça montre que le sport grandit partout dans le monde
, a-t-elle dit à Radio-Canada Sports.
Une locomotive nommée CPKC
Lancée en 2013, la NWSL a récolté une moyenne record de 10 432 spectateurs par match en 2023, en hausse de 32 % par rapport à l’année précédente. Certains des clubs les plus populaires rassemblent des foules comparables aux meilleures ligues professionnelles masculines. San Diego (20 718 par match), Los Angeles (19 756) et Portland (18 918) forment le trio de tête à ce chapitre.
L’élan se fait ressentir dans les portefeuilles. Le transfert de Fleming aux Thorns depuis le club de Chelsea, en janvier, a été estimé à 250 000 livres (425 000 $ CA). Cela représentait le plus important transfert de l’histoire de la NWSL jusqu’à ce que le club d’expansion Bay FC établisse un nouveau record – mondial, celui-là – avec le transfert de l’attaquante nigériane Racheal Kundananji en provenance du Madrid CFF.
Quant au Stade CPKC, pour Canadian Pacific Kansas City, il s’agit du plus important investissement à avoir été fait pour l'avenir de notre sport, partout dans le monde
, selon la commissaire du circuit Jessica Berman, qui s’était exprimée sur le sujet en novembre.
Un coup de chapeau à Kansas City, figure de proue en Amérique du Nord.
Parce que la majorité des 14 équipes de la NWSL jouent dans un stade loué, appartenant souvent à des universités ou à des équipes de la MLS, notamment celles de San Diego, Los Angeles et Portland. Même que la première tentative d'implantation d'un club de la NWSL à Kansas City, le FC Kansas City (2013-2017), jouait ses matchs dans un stade d’école secondaire, et parfois au centre d’entraînement des hommes du Sporting, en MLS.
Les revenus étaient minces, et les foules aussi, avec moins de 3000 spectateurs par match pendant cinq saisons. À son retour, Kansas City a élu domicile au stade du Sporting avec une hausse marquée des spectateurs.
Le choix de construire un stade spécifiquement pour le Current offre toutefois de nouvelles sources de revenus, que ce soit au guichet ou en commandites.
En devenant propriétaire de son stade, le Current a pu vendre le nom de l’enceinte au Canadian Pacific, une entente valide pour 10 ans. Si l’équipe a refusé de dévoiler les détails financiers, le PDG et copropriétaire Chris Long affirme que la situation financière de l’équipe s’est déjà améliorée de 20 millions de dollars par rapport à la saison dernière, avant même le premier match à domicile.
Hausser la barre
C’est surtout pour l’aspect historique que le groupe de propriétaires, dont le quart-arrière vedette des Chiefs de Kansas City Patrick Mahomes fait partie depuis 2023, a choisi d’investir autant dans une équipe professionnelle féminine.
Patrick Mahomes (au centre), sa femme Brittany (à gauche) et Chris Long (de dos) font partie des propriétaires du Current de Kansas City.
Photo : usa today sports / Amy Kontras
Ça hausse la barre, a lancé Chris Long à l’Associated Press. Les gens vont vouloir être là. Les joueuses vont vouloir venir à Kansas City. Je suis convaincu que ce stade aura un impact global, et que d’autres équipes voudront aussi se doter d’infrastructures spécifiques pour les athlètes féminines.
En plus du Stade CPKC, dont la conception permet d’agrandir la capacité à 20 000 places, les propriétaires du Current ont construit un centre d’entraînement de 18 millions. Ils possèdent également des lots avoisinants pour faire de l’endroit l’épicentre du soccer féminin au pays.
Quand on a annoncé ce projet, les gens nous disaient : "Mais vous êtes fous? Vous gaspillez de l’argent!" À notre avis, cet argument n’a pas de sens. Il n’y a aucune raison pour laquelle les femmes ne pourraient pas profiter d’infrastructures conçues pour elles. C’est une occasion unique d'envoyer un message comme quoi le sport féminin peut vraiment être profitable.
Le pari semble réfléchi. D'ailleurs, tous les abonnements de saison du Current sont déjà vendus. De plus, la NWSL attire des investisseurs de renom comme Nathalie Portman et Serena Williams (Los Angeles), Kevin Durant et Eli Manning (New York/New Jersey) ou encore Naomi Osaka et Ons Jabeur (Caroline du Nord).
C'est même le sport féminin tout entier qui traverse une hausse de popularité. La plus récente saison de la WNBA a récolté sa meilleure audience télévisée en deux décennies. À Montréal, le succès immédiat de la LPHF pourrait déboucher sur une rencontre en avril au Centre Bell, afin de battre le record de spectateurs à un match de hockey professionnel féminin. Il a été établi le 16 février, au Scotiabank Arena de Toronto, avec 19 285 personnes dans les gradins.
Plus encore que les occasions de croissance, c’est de s’inscrire dans la conversation des sportifs de salon qui représente la consécration.
Quand on sait que Kansas City vit une époque dorée en matière de succès sportifs – les Chiefs ont remporté les deux derniers Super Bowl, les Royals ont gagné la Série mondiale en 2015 et le Sporting compte parmi les équipes les plus populaires de la MLS –, le Current cherche à suivre la vague tout en invitant les autres équipes de la NWSL à se mouiller.
