Un retour à la compétition axé sur le plaisir pour Sylvie Fréchette

Près de 30 ans se seront écoulés lorsque Sylvie Fréchette effectuera son retour officiel à la compétition ce week-end. La dernière fois qu’elle a tenté d’impressionner les juges en natation artistique, c’était lors des Jeux d’Atlanta en 1996.

La double médaillée olympique participera en premier temps, samedi, au programme libre en solo des 50-59 ans au Championnat provincial des maîtres.

Et c’est une nageuse à la fois sereine et fébrile qui se présentera devant la foule de Québec, au rythme de la chanson Je te laisserai des mots, de Patrick Watson. Le tout, d’abord et avant tout, sous le signe du plaisir et de la simplicité.

Mine de rien, ça fait quelques décennies que je n'ai pas fait de compétition. Mais pour moi, c’est un besoin vital, un bonheur de nager, a-t-elle indiqué en entrevue à Radio-Canada Sports.

Je n’ai pas la prétention de dire que je suis dans une forme physique extraordinaire et que j’ai un niveau technique extraordinaire, mais j'ai la prétention de dire qu'on a le droit, à n'importe quel âge, de vivre sa passion, de la partager avec les gens autour de nous.

La Montréalaise de 56 ans admet avoir retrouvé la flamme de la compétition il y a quelques mois lors d’un passage à Barcelone, où elle a remporté l’or olympique en 1992.

Accompagnée de ses filles, elle y a vécu un moment bien spécial. Elle a renoué avec son programme de l’époque. Une prestation qui a immédiatement ravivé un besoin de retourner dans l’eau.

Ce n’est pas quelque chose que je fais habituellement, mais quand ç’a été terminé, j'étais tellement sur un high. Ç'a pris des heures avant, on dirait, que je revienne dans mon corps, a-t-elle expliqué.

Évidemment, pour un tel retour à la compétition, la préparation diffère grandement de celle en vue des Jeux olympiques. De plus, cela vient avec son lot de défis.

Ma préparation mentale et physique n’a rien à voir avec comment j’étais avant. C’est complètement de la découverte, a souligné la double médaillée olympique. On s'entend, je fais deux heures [d’entraînement] par semaine. Avant, j'en nageais 50, mais j'ai plus de 50 ans, donc c'est très différent.

Malgré tout, une part d’elle souhaite toujours impressionner le public qui sera au rendez-vous.

Mes standards sont très élevés et on dirait que je ne veux pas décevoir les gens. On dirait que je ne veux pas briser l'image que les gens ont de moi dans mon beau maillot de bain blanc, à Barcelone, jeune, fringante, belle... Aujourd'hui, c'est autre chose, c'est un autre niveau.

J'espère que les gens vont être capables d'apprécier la performance avec un œil nouveau, avec un œil différent de celui qu'ils avaient quand ils ont admiré Sylvie à Barcelone, a-t-elle ajouté.

Éviter d’être sa propre ennemie

Malgré tout, avant son retour à la compétition, Sylvie Fréchette s’est fixé trois règles bien claires pour continuer à nager, admettant avoir besoin d’un certain cadre.

D’abord, elle souhaite éviter les blessures. Elle maintient également que le plaisir doit être à l’avant-plan de son retour à la compétition.

À partir du moment où je commence à ne pas être contente, à me dire que ce n'est pas assez… Je ne veux pas aller là [...] J'ai vraiment hâte de me retrouver dans l'eau. Il n'y a pas de drame, c'est du plaisir, c'est du bonheur. Les résultats sont secondaires, a-t-elle affirmé.

Le troisième élément primordial pour Sylvie Fréchette est de respecter ses nouvelles limites. Il faut que je respecte que j'ai l'air de ça. Il faut que j’accepte que ma technique soit comme ça. Il faut que j'accueille ma nouvelle réalité d'une femme de bientôt 57 ans, qui s'entraîne deux heures par semaine, mais qui va nager avec son cœur.

La nageuse artistique se donne le choix de performer seulement si elle se sent bien dans ces paramètres. La seule menace, c'est moi-même, parce que j'ai tendance à toujours vouloir en donner plus, en faire plus. Mais j'essaie vraiment de me protéger de moi finalement, puis de me protéger de la pression que j'aurais envie de me mettre.

Sylvie Fréchette compétitionnera d’abord en solo samedi, avant de prendre part au programme libre en équipe chez les 50-64 ans, dimanche. Cette dynamique de groupe semble grandement contribuer à son nouvel état d’esprit axé sur le plaisir avant tout.

Chaque mardi, son équipe et elle se regroupent dans leur safe place.

C'est un endroit où l'on sait qu'on peut être nous, qu'on peut être vulnérables, qu'on peut être vraies. C'est un endroit où l'on peut se déposer, où l'on s'encourage, où l'on se donne la main pour se surpasser.

Un héritage de fille en mère?

Si un parent doit parfois agir comme figure d’autorité par rapport à son enfant, cette fois, les rôles sont inversés pour Sylvie Fréchette et pour sa fille Maya.

Cette dernière agit à titre d'entraîneuse pour sa mère. Visiblement, la relation mère-fille prend une tout autre dynamique.

Ça ne marche pas très bien quand je l’entraîne. Elle m’a même déjà dit : "Qu’est-ce que tu connais?" Elle a beaucoup de caractère, a-t-elle mentionné en rigolant. Par contre, elle me guide, elle me pousse. Parfois, elle pousse beaucoup, puis d'autres fois, elle est capable de comprendre que je n’ai plus 20 ans.

Si sa fille semble lui donner tout son soutien, Sylvie Fréchette aimerait maintenant offrir à son tour un beau cadeau à sa mère.

Bien que le Championnat provincial ne serve pas de sélection officielle, il est préalable à une participation au Championnat canadien des maîtres, qui se tiendra à Montréal du 10 au 12 mai, soit le même week-end que la fête des Mères.

Je pense que ce serait un beau cadeau de fête des Mères que je pourrais offrir à ma petite maman, de nager au Championnat national et qu'elle soit là pour être témoin de ce beau moment.

Une occasion unique à partager pour la championne olympique qui, la passion dans le regard, affirme vouloir continuer de profiter encore longtemps du plus beau sport du monde.